Newsletter numéro 6 – Juin 2023
Des derniers jours marqués par les émeutes en France et par les conséquences économiques de celles-ci.
Des jours aussi marqués également par la météo extrême et les conséquences de ces températures.
Un mois de juin qui aura vu les crypto-devises faire des mouvements très importants. ET voir le retour de la revanche de la hausse des taux aux USA.
La prochaine conférence aura lieu le 14 Septembre à 13h00 et aura pour thème «Chat GPT, AI : l’intelligence artificielle va-t-elle révolutionner le trading ? ».
Nous vous y attendons très nombreux. En attendant bonnes vacances à tous et retour en septembre.
Au feu les pompiers
La première semaine de juillet, la température mondiale a été la plus élevée jamais enregistrée, selon les données de deux agences de surveillance du climat.
Lundi 3 juillet, la température moyenne de la planète a atteint 17,01 degrés Celsius, soit le niveau le plus élevé des données du National Centers for Environmental Prediction qui remontent à 1979. Le précédent record de 16,92 degrés Celsius avait été établi en août 2016.
« Victoire » ! Le record est déjà battu le lendemain avec une nouvelle marque le mardi 4 de 17,18 degrés Celsius.
Les experts préviennent que le record pourrait être battu à plusieurs reprises cette année. Ce record mondial est provisoire, mais il constitue une autre indication de la rapidité avec laquelle la planète se réchauffe, car l’arrivée du phénomène climatique naturel El Niño, qui a un effet réchauffant, vient s’ajouter au réchauffement planétaire alimenté par le changement climatique.
Cette année, des records de chaleur ont déjà été battus dans le monde entier, avec des conséquences dévastatrices.
- Aux États-Unis, le Texas et le Sud ont souffert d’une vague de chaleur brutale à la fin du mois de juin, avec des températures à trois chiffres et une humidité extrême.
- Au Canada les feux de forêt dus aux températures extrêmes ont obscurci les cieux jusqu’à la région parisienne !
- Au Mexique, la montée en flèche des températures a tué au moins 112 personnes depuis le mois de
- En Inde, une vague de chaleur torride a tué au moins 44 personnes et la Chine a elle-aussi connu plusieurs vagues de chaleur torride et a enregistré le plus grand nombre de journées chaudes – où la température quotidienne maximale a dépassé 35 degrés Celsius sur une période de six mois depuis le début des relevés.
- Le Royaume-Uni a enregistré le mois de juin le plus chaud depuis le début des relevés en 1884, selon le service météorologique national, le Met
El Niño est de retour
Les gouvernements doivent se préparer à des phénomènes météorologiques plus extrêmes et à des températures record dans les mois à venir, a averti mardi l’Organisation météorologique mondiale (OMM), qui a annoncé le début du phénomène de réchauffement El Niño.
Mais c’est quoi El Niño ?
El Niño est un phénomène climatique naturel dans l’océan Pacifique tropical qui entraîne des températures de surface de la mer plus élevées que la moyenne et qui exerce une influence majeure sur les conditions météorologiques dans le monde entier, affectant des milliards de personnes.
Selon l’OMM, l’agence des Nations unies pour la météorologie, le climat et les ressources en eau, l’année 2016 a été la plus chaude jamais enregistrée en raison d’un très fort phénomène El Niño et du réchauffement dû à l’utilisation de combustibles fossiles par l’homme.
Le premier phénomène El Niño observé depuis sept ans, s’ajoute au réchauffement planétaire d’origine humaine et il existe une très forte probabilité pour qu’El Niño se poursuive au cours du second semestre 2023, avec une intensité modérée. Et permettre de battre tous les records de chaleurs en 2023 et 2024.
Outre le réchauffement accru des océans, les phénomènes El Niño sont généralement associés à une augmentation des précipitations dans certaines régions du sud de l’Amérique du Sud, du sud des États-Unis, de la Corne de l’Afrique et de l’Asie centrale. Mais il peut aussi amplifier les graves sécheresses, les vagues de chaleur et les incendies de forêt en Australie, en Indonésie, dans certaines parties du sud de l’Asie, en Amérique centrale et dans le nord de l’Amérique du Sud.
Les conséquences économiques
Les marchés de matières premières sont évidemment très touchés par El Niño. Par exemple, en Inde, l’un des principaux pays producteurs de riz, El Niño peut affaiblir la mousson qui apporte les précipitations dont le pays a besoin pour remplir ses aquifères et cultiver ses terres.
De même, El Niño pourrait également nuire à la croissance économique des États-Unis, ce qui pourrait avoir des répercussions sur tous les aspects de l’économie, des prix des denrées alimentaires aux ventes de vêtements d’hiver.
Les conséquences économiques associées à El Niño sont nombreuses et potentiellement catastrophiques :
- Par exemple, comme pour l’inde et la mousson, El Niño peut perturber le régime des précipitations. Du coup cela a la capacité d’entraîner des conditions de sécheresse accrues dans certaines régions et des précipitations excessives dans d’autres. Ces phénomènes météorologiques extrêmes peuvent avoir un impact significatif sur la productivité agricole. Les sécheresses peuvent réduire le rendement des cultures, entraîner des pertes de bétail et augmenter les coûts d’irrigation. Les précipitations excessives peuvent provoquer des inondations, l’érosion des sols et des dommages aux cultures, ce qui entraîne une réduction de la production agricole et une augmentation des prix des denrées alimentaires.
- El Niño peut ainsi perturber la production agricole mondiale et affecter les marchés des matières premières. La réduction des rendements agricoles ou l’augmentation des prix de certains produits agricoles peuvent avoir un impact sur les prix des denrées alimentaires au niveau mondial. En outre, les changements météorologiques peuvent perturber les voies de transport et d’expédition, ce qui peut entraîner des retards et une augmentation des coûts dans le commerce mondial.
- El Niño et sa sœur La Niña modifient les températures et les courants océaniques, ce qui affecte les écosystèmes marins et les populations de
Les changements de température de l’eau peuvent avoir un impact sur la distribution et la disponibilité des espèces de poissons, entraînant une réduction des prises et des pertes économiques pour les communautés de pêcheurs. Dans certains cas, El Niño peut entraîner la disparition des poissons et la prolifération d’algues nuisibles, ce qui a un impact supplémentaire sur les pêcheries et les industries connexes.
- El Niño peut bien entendu influencer les marchés de l’énergie. En particulier dans les régions où les conditions de sécheresse résultant d’El Niño peuvent réduire les niveaux d’eau dans les réservoirs, ce qui entraîne une baisse de la production d’énergie hydroélectrique et un recours accru à des sources d’énergie alternatives. Cela peut entraîner une hausse des prix de l’énergie et des coûts pour les industries qui dépendent d’une électricité abordable.
- El Niño peut aussi avoir des effets négatifs sur le tourisme et les activités de loisirs dans certaines zones côtières où El Niño peut provoquer l’érosion des côtes et endommager les
- Pour les assurances, El Niño est un cauchemar : la fréquence et l’intensité accrues des phénomènes météorologiques extrêmes associés tels que les ouragans, les tempêtes et les inondations, peuvent entraîner une augmentation des demandes d’indemnisation et des coûts pour les Les gouvernements et les organisations pourraient également devoir allouer des ressources supplémentaires à la gestion des catastrophes ce qui pèserait sur les finances publiques.
Une étude attribue 5700 milliards de dollars de pertes de revenus mondiaux à l’El Niño de 1997-1998 et 4100 milliards de dollars de pertes à l’El Niño de 1982-1983.
Le monde pourrait également être temporairement poussé au-delà de 1,5 degré Celsius de réchauffement par rapport aux niveaux préindustriels – un point de basculement clé au-delà duquel les risques d’inondations extrêmes, de sécheresse, d’incendies de forêt et de pénuries alimentaires pourraient augmenter de façon spectaculaire.
Une manif peut en cacher une autre
On pensait être revenu au calme quelques semaines seulement après la fin des manifestations et des grèves liées à la réforme des retraites en France qui avaient fortement perturbé les entreprises du pays. C’est vraiment raté.
Maintenant nous voici aux prises avec les retombées d’une semaine d’émeutes. Nous n’analyserons bien sûr ici que les retombées économiques de ces évènements et non leurs causes politiques sociales.
Bruno Le Maire nous annonce mercredi 5 juillet que les manifestants ont attaqué près de 400 agences bancaires et 500 commerces de proximité. Il a également estimé le nombre total de magasins pillés à 1 000.
Bien sûr, encore une fois le gouvernement viendra en aide aux entreprises touchées. Ainsi, les impôts et les cotisations sociales seront reportés pour les magasins qui ont été attaqués, et annulés pour les plus touchés. Les entreprises auront également 30 jours, au lieu de cinq, pour faire une demande d’indemnisation auprès de leur assurance.
Même si ce coût est conséquent pour les finances publiques, Le Maire a minimisé l’impact probable sur l’ensemble de l’économie française déclarant que les émeutes « n’auront pas d’impact profond sur la croissance française ».
Ainsi si le chiffre de 1 milliard d’euros de dégâts a été annoncé, le total des pertes assurées pour le secteur français de l’assurance devrait rester bien en dessous de ce montant, du fait en particulier que les pertes d’exploitation résultant du vandalisme, des pillages et d’éventuels couvre- feux ne seront probablement pas couvertes.
Mais le vrai problème est probablement ailleurs.
Les entreprises françaises se préparent maintenant à souffrir davantage, car les touristes, effrayés par les images de violence et de chaos dans toute la France, décident de ne pas se rendre dans l’une des destinations les plus populaires au monde.
Depuis le début du mois de juillet, les touristes étrangers ont annulé 20 à 25 % des voyages prévus à Paris, a déclaré Geoffroy Roux de Bézieux, président du MEDEF.
Ces perturbations surviennent à un très mauvais moment pour l’économie française.
En effet, si la France avait enregistré des résultats supérieurs à ceux de la zone euro au cours des premiers mois de 2023, malgré des mois de manifestations et de grèves, depuis mai l’activité est au point mort.
Les données de PMI (voir l’article qui suit plus loin dans la newsletter) indiquent que la production française a diminué en juin pour la première fois cette année, et au rythme le plus rapide depuis février 2021, alors que le secteur des services s’est inversé et que le ralentissement de l’industrie manufacturière s’est accentué.
Et à l’horizon arrivent la coupe du monde de Rugby et les jeux olympiques …
La capacité de la France à accueillir des événements majeurs a déjà été remise en question à la suite de défaillances majeures dans la gestion des foules lors de la finale de la Ligue des champions 2022 au Stade de France.
Les politiques tentent pourtant de rassurer tout ce monde : “Nous serons à la hauteur des besoins en matière de sécurité pour les Jeux, a ainsi déclaré Pierre Rabadan, le chef des sports de la mairie de Paris, tout en ajoutant qu’il y aurait “sans aucun doute” des perturbations.
La ministre des Sports, Mme Oudea-Castera, a également déclaré lundi que la nation avait été abîmée par tout cela. Et que ce qui se passait n’était évidemment pas bon pour l’image de la France à l’étranger. Mais a ajouté qu’il y avait eu des événements de ce type à peu près un an avant les Jeux de Londres, avec des manifestations très violentes à la suite de violences policières. Mais que les Jeux de Londres avaient été très positifs pour l’économie du pays.
« When I see a bird that walks like a duck, swims like a duck and quacks like a duck, I call this bird a duck. »
Winter is (encore une fois) coming pour les cryptos
On pensait l’hiver des crypto-monnaies passé, mais c’est carrément une ère glaciaire qui est tombée cette semaine sur le marché.
Le gouvernement américain et la SEC semblent avoir décidé d’en finir avec l’écosystème des crypto-monnaies.
Si pendant plus d’une décennie, les cryptomonnaies ont bénéficié du doute auprès du régulateur, cette époque est visiblement belle et bien terminée.
Car il faut quand même l’avouer, l’idée même des crypto-monnaies n’a jamais été tout à̀ fait acceptable pour le gouvernement. En effet, le but initial, la création d’une monnaie numérique qui pourrait remplacer le dollar, semblait
illégal dès le premier jour puisque le FBI avait alors explicitement déclaré, il y a plus de dix ans :
“c’est une violation de la loi fédérale pour les individus […] de créer des systèmes de monnaies privées pour concurrencer la monnaie officielle des États-Unis”.
Oui, mais …
Les autorités se sont abstenues de prendre des mesures répressives à l’égard des cryptomonnaies au fur et à̀ mesure que le secteur se développait. On n’a pas mis les utilisateurs de Bitcoin sous les verrous (heureusement !) et les entreprises du secteur ont jusque-là échappé aux poursuites.
Les marchés étaient convaincus que la technologie était révolutionnaire et qu’il serait impossible de la déclarer illégale dans le « land of the free » qui a abrité la plupart des percées technologiques des dernières décennies.
Seulement voilà̀ : l’implosion de FTX a tout changé.
Et en particulier, anéanti tout espoir de voir le Congrès adopter une législation qui légitimerait l’industrie des crypto-monnaies. L’objectif essentiel des politiques est de retirer la pertinence des crypto-monnaies d’un point de vue systémique. La répression de la SEC contre les crypto-monnaies n’était plus qu’une question de temps.
L’hiver depuis un an
Dans le monde des crypto-monnaies, on appelle « crypto-winter » la longue période de troubles qui s’installe sur le marché. Avec une expression qui vient probablement de la série « Game of Thrones », on qualifie ainsi les périodes prolongées de faiblesse des prix sur le marché.
Dans cette série, la devise des Stark était “Winter Is Coming” et était un avertissement indiquant qu’un conflit durable allait s’abattre sur le pays à tout moment.
Le conflit qui fait rage aujourd’hui oppose le monde des cryptos à la Securities And Exchange Commission (SEC) et particulièrement son président Gary Gensler. Et oui, c’est aussi sanglant que la série.
Avant toute chose, qui est Gary Gensler ?
Comme à peu près tout le monde, Gensler est un ancien de la prestigieuse Goldman Sachs, où il commence sa carrière aux fusions acquisitions. Il quitte Goldman pour rejoindre le gouvernement en tant que secrétaire adjoint du Trésor.
Durant ses années au Trésor, Gary joue un rôle important dans l’adoption du “Commodity Futures Modernization Act” qui vise à̀ exempter les dérivés OTC de la régulation.
Cet acte va donner les mains libres aux banques pour faire toutes sortes de produits complexes et va jouer un grand rôle dans la crise financière de 2008
Après la crise, Gensler devient président de la CFTC (Commodity Futures Trading Commission), agence fédérale indépendante américaine chargée de réguler les marchés de matières premières. Il est alors considéré comme l’un des principaux réformateurs post crise et a intensément travaillé sur la
règlementation Dodd Frank sur le renforcement de la surveillance du marché́ des dérivés OTC, plus particulièrement les swaps.
On voit ici le caractère assez paradoxal de Gary Gensler qui en 2000 est à̀ l’origine de l’exemption de la régulation des swaps qui a contribué en grande partie à̀ l’effondrement du système en général et de Lehman Brothers en particulier mais en 2009 nous fait un premier retournement de veste avec un
texte très liberticide pour les banques américaines.
Mais Gensler fait son mea culpa puisqu’il avoue en 2009 :
“Je faisais partie du consensus sur les produits dérivés, et nous n’avons pas vu venir la crise. Nous aurions dû faire plus pour protéger le peuple américain.”
Car c’est bien le but ultime des réformes post crise : protéger le « taxpayer ». Le titre de Dodd Frank est ainsi :
« An Act to promote the financial stability of the United States …, to end “too big to fail”, to protect the American taxpayer by ending bailouts, to protect consumers from abusive financial services practices. »
En 2018, Gensler devient professeur au MIT (Sloan School) et surprise, il mène des recherches et enseigne sur la technologie blockchain, les cryptomonnaies et autres technologies dans le domaine de la finance.
Dans son cours (disponible en ligne sur le site du MIT), Gensler met déjà̀ l’accent sur le manque de régulation dans ce secteur.
Gensler affirmait déjà̀ à l’époque que la majorité des cryptomonnaies étaient des titres “Securities” et non des devises et qu’il fallait donc qu’elles soient gérées comme telles. Soit selon les critères du Securities Act de 1934.
Acceptable, n’est-ce pas ? Pourtant juste l’année d’avant, il affirmait exactement le contraire en disant que les 3⁄4 des cryptos étaient des Commodities et non des Securities. Encore un changement de direction dans les opinions très diverses du futur président de la SEC sur ce marché. D’autant que son successeur à la CTFC, Roslin Behnam, possède une opinion sur le sujet radicalement opposée.
FOMO (Fear of missing out)
Mais bon, pourquoi est-ce si important ?
C’est simple, les titres sont régulés par la SEC, la Securities and Exchange Commission, l’organisme de régulation des marchés financiers aux États-Unis, semblable à l’Autorité́ des Marchés Financiers (AMF) en France. Son rôle principal est de protéger les investisseurs privés et les épargnants contre les
abus éventuels, c’est-à-dire la croisade personnelle de Gensler depuis son départ de Goldman.
Il est donc à la tête de l’agence chargée de surveiller les marchés financiers et sanctionner les transgresseurs en cas de non-respect des règles.
Quand il est nommé président de la Securities and Exchange Commission, la communauté́ crypto était alors très enthousiaste quant à̀ cette nomination.
En effet, Gary est un homme qui comprend les travers de la finance traditionnelle et qui saisit l’importance de la blockchain et des cryptomonnaies grâce à son expérience d’enseignant dans ce domaine au MIT.
À son arrivée à̀ la SEC, Gensler évolue sur un terrain qui lui est doublement familier puisque concernant les cryptomonnaies, il a une connaissance du domaine, mais d’autre part, par son passage au CFTC, une connaissance des marchés peu règlementés.
Mais Gensler ne veut pas commettre la même erreur deux fois et ne veut pas ignorer les prémisses d’une crise comme en 2008.
Ainsi la lune de miel entre la SEC et les bourses d’échanges de cryptos va être de courte durée. Après sa nomination ans, Gary Gensler a exhorté les plateformes à s’enregistrer auprès de l’agence et a souligné que la plupart des tokens numériques étaient considérés comme des titres.
Mais son discours s’est durci au cours des derniers mois, après l’échec de la bourse de cryptomonnaies FTX en novembre dernier. Et après l’effondrement de FTX et de Terra l’année dernière, la Securities and Exchange Commission a décidé́ d’attaquer les marchés crypto au niveau de leur talon d’Achille : La conformité règlementaire.
Il est clair que le renforcement de la règlementation crée des obstacles pour la communauté cryptographique, mais ce renforcement a du bon puisqu’il légitimise un marché jeune, le rendant de fait plus attrayant pour les investisseurs.
Mais le weekend du 10 juin a vu une accélération des sanctions contre les plateformes de négociation de cryptos et la baisse des devises à un rythme vraiment alarmant.
Les poursuites engagées cette semaine contre les bourses de crypto-monnaies Binance et Coinbase constituent l’attaque la plus virulente jusque-là̀ de la SEC contre le marché́ des actifs numériques.
En disant que les cryptos sont des titres, elle accuse transitivement les exchanges de violer les lois américaines sur les valeurs mobilières, d’avoir donc offert des titres non enregistrés et d’avoir opéré en tant que lieux d’échange
non enregistrés, entre autres. Pour la SEC, s’il y a une réelle valeur dans les tokens de crypto-monnaie, alors la conformité́ établira la confiance et le modèle d’entreprise pourrait changer.
Binance et Coinbase à elle deux représentent la moitié́ des échanges mondiaux d’actifs numériques. C’est dire l’ampleur de l’attaque.
Avec ces deux actions en justice, la SEC a dressé́ une liste de plus d’une douzaine de tokens qu’elle considère comme des titres, dont les populaires Solana et Cardano. A la suite de cela, le Token Solana a perdu dans la semaine près de 35% de sa valeur passant de 22$ à juste au-dessus de 14$. Cela fait une chute de 94% depuis son plus haut de novembre 2021.
My Taylor is (very) Rich
Prenons par exemple le cas de Taylor Swift.
Taylor Swift a refusé un juteux contrat à 100 millions de dollars avec FTX, car elle avait des doutes sur la légalité de l’opération. Bon d’accord, elle gagne 13 millions de dollars par concert tous les soirs, mais quand même c’était un sacré contrat !
L’avocat Adam Moskowitz, qui s’occupe d’un recours collectif contre plusieurs stars ayant fait la promotion de la plateforme a déclaré qu’elle avait été la seule célébrité à remettre en question le flou réglementaire autour des crypto-monnaies, et a du coup refusé d’en faire la promotion.
Il ajoute que les stars qui ont soutenu FTX (dont Tom Brady, Gisèle Bundchen et Shaquille O’Neal qui eux ont pris l’argent sans sourciller) n’avaient pas fait preuve d’assez de vigilance et auraient dû vérifier si FTX n’enfreignait pas la loi.
Outre la spéculation et la gestion douteuse de l’entreprise, selon l’avocat, les titres financiers avaient beau être des actifs numériques sous forme NFT, ils sembleraient qu’ils doivent aux États-Unis, être enregistrés auprès de la SEC, comme n’importe quelle action ou obligation.
C’est exactement sur ce point que Taylor Swift a été prudente. La vérification semble élémentaire, mais selon Maître Moskowitz, elle a été la seule célébrité à avoir demandé, avant de signer le partenariat : « Pouvez-vous m’assurer qu’il ne s’agit pas de titres non enregistrés? ».
La contre-attaque
Après deux grands procès en juin, l’ancien banquier de Goldman Sachs devenu régulateur est devenu procureur en disant que « nous n’avons pas besoin de plus de monnaie numérique car nous avons déjà̀ une monnaie numérique. Elle s’appelle le dollar américain ».
Mais l’une des principales plaintes du secteur des cryptomonnaies est l’absence totale de clarté de l’autorité́ de régulation américaine quant à̀ la définition d’une valeur mobilière et ses revirements incessants.
De plus l’autorité de Gessler est remise en question : en effet, avant la croisade de répression de la SEC contre Binance, Gensler a tenté d’établir une relation plus étroite avec la société et était très proche de Binance. Peut-on ainsi mener un dossier après avoir été si proche de la source ?
Des informations provenant des messages internes de Binance et d’une source proche de Gensler suggèrent que Binance l’a initialement contacté. Selon l’équipe juridique de Binance, le président de Binance, Changpeng Zhao, est resté en contact avec lui et à la demande de Gensler a même assisté à un entretien avec lui dans le cadre d’un cours de crypto-monnaie que Gensler enseignait au MIT.
Il semble que Changpeng Zhao ait compris que Gensler agissait en tant que conseiller informel, ce qui brouille davantage les lignes de leur relation. Les crypto-lovers pensent même que Gensler mène une campagne de revanche personnelle contre Binance et le monde crypto en général.
L’équipe juridique de Binance soutient donc que Gensler devrait être disqualifié de toute implication dans leur affaire en raison de la connexion de Gensler à Zhao qui fait de lui un témoin potentiel avec des informations importantes sur l’entreprise.
Chez Coinbase, le ton est différent.
Brian Armstrong, directeur de Coinbase, a déclaré́ ainsi que la SEC s’appuyait sur une approche uniquement axée sur l’application qui nuisait à̀ l’Amérique et que la SEC et la Commodity Futures Trading Commission ont fait des déclarations contradictoires et ne sont même pas d’accord sur ce qu’est un titre. Les contradictoires dans les discours de Gensler à la SEC et Behnam à la
CFTC iraient plutôt dans le sens d’Armstrong.
Coinbase et Binance ont indiqué qu’elles contesteraient toutes les deux les accusations de la SEC devant les tribunaux, et Coinbase a déclaré qu’ils continueraient à faire pression sur les politiciens pour qu’ils adoptent des règles plus claires pour le marché́ des crypto-monnaies aux États-Unis.
De plus, les sociétés de crypto-monnaies soutiennent qu’il n’y a pas de voie facile pour s’enregistrer auprès de la SEC et qu’elles se trouvent dans une position précaire.
Le marché des cryptos a repris des couleurs en début juillet 2023 mais n’est ce qu’une question de temps avant que le SEC recommence ses attaques sur la crypto-communauté ? Ou, comme je le pense, le train de la révolution cryptographique en marche est inarrêtable ?
L’inflation, toujours l’inflation
Ah les chiffres du vendredi !
Ils sont toujours attendus avec beaucoup d’attention.
D’habitude c’est le premier vendredi du mois que la planète finance retient son souffle avec le chiffre le plus important : celui des NFP (non farm payrolls).
Les “non-farm payrolls” sont un indicateur économique clé publié chaque mois aux États-Unis qui mesure le nombre total d’emplois créés (ou perdus) dans l’économie américaine, à l’exclusion des emplois agricoles.
Ce chiffre fournit des informations importantes sur la santé globale du marché du travail américain et sont considérés comme un indicateur clé de la croissance économique.
Pour le NFP, c’est encore le 7 juillet (demain à la rédaction de ce texte) à attendre. Il sera riche d’enseignement. On s’attend encore une fois à un chiffre monstrueux compris entre 200 et 500 mille créations d’emplois ce qui est très loin des niveaux de récession !
Cela vient après la publications des « minutes » de la FED qui étaient tout sauf baissière en taux ! Lors de leur réunion de juin, les responsables de la Fed avaient décidé d’attendre avant de relever les taux d’intérêt, optant pour une pause afin d’évaluer l’impact des dix hausses précédentes.
Les procès-verbaux publiés mercredi ont fait état de désaccords entre les membres, certains estimant que les taux devraient être relevés étant donné
que l’inflation reste élevée. Il est clair que l’on n’a pas vu la fin de la hausse des taux aux USA.
Après l’accalmie due à la crise bancaire de Mars, nous revoilà sur les lus depuis près de 20 ans sur les taux américains.
Et en Europe ?
Le vendredi 23 juin, on attendait un chiffre important pour la zone euro : l’indice PMI composite. Celui-ci est un peu plus complexe à analyser !
Traduit en français par « indice des directeurs d’achat » (pour Purchasing Managers’ Index), c’est un indicateur économique utilisé pour évaluer la santé générale de l’économie.
Il combine les données de plusieurs indices PMI sectoriels, tels que l’indice PMI manufacturier et l’indice PMI des services, afin de fournir une mesure globale de l’activité économique.
L’indice PMI composite est calculé en agrégeant les données des indices sectoriels. Il est exprimé sous forme d’indice sur une échelle de 0 à 100.
Un niveau supérieur à 50 indique une expansion de l’activité économique, tandis qu’un niveau inférieur à 50 suggère une contraction de l’activité. Plus le chiffre s’éloigne de 50, plus l’expansion ou la contraction est marquée.
On pourrait se dire que ce chiffre est très subjectif et moins important que les données économiques brutes (comme le taux d’inflation ou de chômage par exemple).
Pourtant, cet indice est très largement suivi par les économistes, les analystes financiers et les investisseurs car il fournit des informations précieuses sur la tendance générale de l’économie. En particulier cette semaine, il était grandement attendu.
UN BON 180°
Car, il y a eu un très fort changement d’atmosphère dans les marchés, le chiffre du PMI était extrêmement attendu par les observateurs. En effet la semaine a été difficile avec une sentiment de fin de partie en Bourse où le CAC40 finit la semaine dans le rouge après avoir quasiment battu ses records de l’année.
C’est que le discours généralement admis d’une quasi-certitude que le pic d’inflation était atteint et que le pire était derrière nous a changé radicalement ces derniers jours.
Effectivement, l’optimisme revenait puisque depuis deux ou trois mois, les chiffres de l’inflation en Europe indiquaient une forte accalmie et les cycles de hausses des taux pouvaient être terminés. L’inflation dans la zone euro avait chuté d’un pic de 10,6 pour cent à 5,7 pour cent en juin.
Mais badaboum, en quelques jours, on retrouve le sentiment pérenne et lancinant que l’inflation n’est toujours pas vaincue et que la machine à hausse des taux allait encore chauffer.
En effet, cette semaine deux évènements ont changé le point de vue ambient.
Le premier est l’inflation en Grande-Bretagne qui continue à progresser et force la Bank of England à continuer à relever ses taux.
Nous l’avons maintes fois dit : la situation en Grande-Bretagne est très spécifique car nos « amis » anglais subissent encore et toujours la suite des effets du Brexit en particulier du fait de la rareté de la main d’œuvre et la hausse des salaires.
Hier, alors que tout le monde attendait une hausse de 0,25% la BOE a décidé de ne pas y aller avec le dos de la cuillère et de monter les taux de 0,5%.
OK, les prix ne veulent pas descendre en Angleterre, pourquoi pas !
Aux USA, on est reparti pour un tour.
Une déclaration du patron de la FED a mis le feu aux poudres. Powell a averti que les taux recommenceraient à monter après la pause du mois de juin.
Et la Secrétaire au Trésor Yellen en a remis une tartine en déclarant que le risque de récession aux États-Unis s’éloignait, et que la consommation des ménages restait trop élevée pour permettre à l’inflation de reculer suffisamment.
Les responsables de la Réserve fédérale ont indiqué qu’ils avaient l’intention de reprendre les augmentations de taux d’intérêt, alors qu’un consensus de plus en plus large se dégage sur la nécessité d’un resserrement supplémentaire pour éradiquer l’inflation élevée dans la plus grande économie du monde.
Selon les minutes de la réunion de juin du Comité fédéral de l’open market, “presque tous” les responsables qui y ont participé ont déclaré que des “augmentations supplémentaires” du taux d’intérêt de référence de la Fed seraient “appropriées”.
Ils ont ajouté que le marché du travail “tendu” et les “risques de hausse” de l’inflation restaient des “facteurs clés” déterminant les perspectives près d’un an et demi après que la banque centrale américaine se soit lancée dans un cycle agressif de hausses des taux d’intérêt afin de maîtriser les pressions sur les prix.
Certains responsables de la Fed étaient favorables à une augmentation de 25 points de base des taux d’intérêt en juin, plutôt qu’à une pause dans la poursuite du resserrement qui a finalement été soutenue par le comité, selon les minutes.
Toutefois, la plupart des responsables de la Fed ont souligné “l’incertitude” des perspectives et ont déclaré que des informations supplémentaires sur l’économie seraient “précieuses”.
En ce qui concerne les perspectives économiques, les responsables de la Fed ont déclaré qu’ils s’attendaient à ce que la croissance soit “modérée” pour le reste de l’année, même si les “tensions bancaires” avaient “diminué” par rapport au début de l’année. S
On s’en souvient, la réunion de juin avait marqué le premier répit dans la campagne de la Fed pour éradiquer l’inflation tenace après qu’elle ait atteint un sommet de plusieurs décennies l’année dernière.
Après avoir relevé le taux d’intérêt de référence lors de dix réunions consécutives – parfois par intervalles de trois quarts ou d’un demi-point – les responsables de la banque centrale ont choisi de le maintenir dans une fourchette cible comprise entre 5 % et 5,25 %.
Jay Powell avait justifié cette pause en déclarant que les effets des précédentes hausses de taux devaient encore faire leur chemin dans l’économie, en plus du frein à l’embauche et à la croissance causé par les turbulences entre les banques régionales au début de l’année.
Mais de nouvelles hausses de taux sont largement attendues cette année, la plupart des responsables prévoyant que le taux de référence atteindra finalement une fourchette comprise entre 5,5 % et 5,75 %.
Cela se traduit par deux hausses supplémentaires d’un quart de point, la première étant susceptible d’intervenir lors de la prochaine réunion de la Fed, à la fin du mois.
Plus grave encore, les responsables de la Fed ne prévoient aucune réduction des taux avant 2024, car ils s’attendent à ce que l’inflation “de base”, qui exclut les prix volatils de l’alimentation et de l’énergie, reste bien supérieure à l’objectif que la banque centrale s’est fixé de longue date.
Tuer une mouche avec un marteau ?
Est-ce que nos banquiers centraux s’affolent pour rien ? Peut-être. Est-ce que cela fait mal à la croissance de l’économie ? Certainement !
Car nous le savons, les relèvements successifs des taux entrainent une économie toujours plus fragile.
Et ce 23 juin, la cabane est tombée sur le chien. Les chiffres du PMI annoncent que l’économie de la zone euro s’est fortement ralentie, indiquant que la période de croissance récente dans le secteur des services est en train de s’arrêter et que les pressions sur les prix s’atténuent.
Le PMI manufacturier est tombé à 50,3, son niveau le plus bas depuis cinq mois, selon les données publiées vendredi, contre 52,8 le mois précédent. Surtout ce chiffre est inférieur aux 52,5 prévus par les économistes.
On le sait, en se rapprochant de la barre des 50 on se rapproche de la ligne fatale qui sépare la contraction de l’expansion.
Ce résultat réduit les espoirs d’un rebond économique dans la zone euro et montre que les prévisions de la BCE étaient tout à fait trop optimistes. On se dirige clairement vers un nouveau trimestre faible, avec la possibilité de flirter à nouveau avec la récession.
Car la BCE avait prévu que le PIB de l’Union européenne augmenterait de 0,9 % cette année, malgré les baisses de 0,1 % enregistrées au cours des deux derniers trimestres. Cette prévision déjà largement considérée comme trop optimiste par les économistes a été maintenant rendue impossible par les données de ce matin et il est tout à fait certain que la prévision sera revue à la baisse en septembre.
Le ralentissement a été particulièrement marqué en France, où les niveaux d’activité des entreprises de services se sont contractés pour la première fois depuis le début de l’année.
Alors nous voilà devant un bon dilemme, le fameux dilemme des banquiers centraux qui doivent jouer avec les deux leviers de la croissance et de l’inflation.
Car nous ne devons pas oublier un des règles de base de l’économie : tout prend du temps ! L’impact des hausses de taux d’intérêt ne peut pas être immédiat et il faut tabler sur un effet moyen terme (18 mois / 2 ans ?) pour qu’elles se diffusent dans l’économie.
Est-ce que tout cela va pousser la BCE à être plus prudente quant à de nouvelles augmentations des taux d’intérêt au-delà de celle de juillet déjà signalée par Mme Lagarde comme étant “très probable”. Probablement. Est-ce que c’est une bonne chose ? Probablement aussi.